Nouvelle Lecture

Bienvenue

// Clément Sayous, étudient à l'Institut d'Art Visuel DNSEP (option design visuel)

Réflexion sur la nouvelle définition du Lecteur et sur son rôle face à l’information et au nouveau média.

A partir des pistes et hypothèses misent en avant lors de la recherche bibliographique, réalisation d’expérimentations autour des grandes questions et de la problématique.
Chaque expérimentation sera accompagnée d’un article explicatif et documenté. Même si elle pourrait parfois sembler courtes ou encore secondaires, ses recherches permettront de construire et d’enrichir un plus grand projet et une réponse direct à la problématique.


Ce blog est le journal de ma recherche.

07/11/2010

Potlatch

Potlatch est une revue de l'international lettriste parue en 29 numéros,entre le 22 juin 1954 et le 5 novembre 1957 (même si sa parution est irégulère).

Potlatch propose un abonnement un peu particulier. En effet, en plus des personnes qui avaient demandées à la recevoir gratuitement, la revue était également envoyée à une sélection de personnes qui n'avait rien demandée à personne...

Ce principe s'inspire du comportement culturel améridien du même nom. En effet, en chinook, potlatch signifie "donner".
Il s'agit d'un système de don / contre-don. Celui qui reçoit donne à son tour quelque chose qu'il considère de valeur équivalente. Il ne s'agit pas tout à fait d'un troc, puisqu'il ne se base pas sur un accord mutuel sur une valeur marchande équivalente.
C'est grâce à ce principe que les colons ont put "échangés" de l'or et des états contre du wisky et des couvertures.

Dans le cas de la revue lettriste, je me demande ce qui constituait le contre-don (même si j'ai ma petite idée)... Si vous avez des propositions, je suis prenneur.

Retranscription numerique du livre de Guy Debord "POTLATCH (1954-1957), Les Éditions Allia, Paris, 1996, 160 pages", site de l'université de Quebec.

Entretien avec Eric Watier


« La simplicité n'est pas un but dans l'art, mais on arrive à la simplicité malgré soi en s'approchant du sens réel des choses. » 

Constantin Brancusi



Depuis plus de vingt ans, Eric Watier crée des livres. Il approche le livre d’artiste en photocopiant ses dessins.

Débute alors une recherche sur la dégradation, la perte de qualité et le rapport entre original et copie. Il en résulte un questionnement autour du droit d’auteur, du don (Donner c’est donner), qui l’amènera à diffuser gratuitement ses livres (BLOC, publié aux éditions Zédélé en 2006 est également téléchargeable librement sur son site internet et celui de l’éditeur). 

Sa pratique du livre l’amène à une certaine simplicité. Grâce à des moyens légers, Eric Watier propose une certaine définition du livre qui rappelle que « c’est dans la simplicité du livre que réside sa beauté, mais aussi l’ingéniosité de son invention » (Leszek Brogoswki). Mais Eric Watier ne se limite pas au livre. Affiches, cartes postales ou encore billets de banque et autres papiers supportent un graphisme empreint de sobriété et d’efficacité.



« Faire un livre c'est facile

Prenez une feuille à l'italienne.
Imprimez au recto la couverture et au verso l'intérieur du livre.
Pliez.
Rognez si nécessaire.
Recommencez. »


Ce "mode d'emploi" expose assez bien le rôle du pli dans votre approche du livre. Ce travail de plis vient-il d'un désir de simplicité ou de l'envie de toucher à quelque chose d'essentiel dans le livre ? 

Les deux. Enfin, je ne sais pas s'il s'agissait de toucher à quelque chose d'essentiel. Il s'agissait surtout de trouver la forme la plus simple.
Je travaillais déjà sur la forme même du livre. En fait j'ai toujours été très attentif à la construction même du livre : sa couverture, comment le livre commence, comment il finit, la place du titre, du nom d'auteur, le papier, le façonnage, etc. 

Un livre (Un pli.) est une tentative pour garder toutes les caractéristiques du livre classique (du codex) mais en les réduisant au minimum : prise en main, couverture (le gris), titre, ouverture, contenu (papier (presque) blanc + texte), fermeture. 

Par ailleurs je façonnais moi-même mes livres (Architectures remarquables, Paysages avec retard...) et je trouvais ça de plus en plus fastidieux. Il fallait donc supprimer des étapes de fabrication : j'ai supprimé l'agrafage. 

Cette forme très simple induisait aussi un nouveau rythme de lecture : une lecture à trois temps (1ère de couverture, intérieur, 4ème de couverture). 

Pour finir, c'est vraiment un livre à manipuler (j'adore pour ça le flip-book en deux images de Julien Nédélec) et je ne sais pas si vous possédez un exemplaire de un livre Un livre (Un pli.). Si vous n'en avez pas je peux vous envoyer un exemplaire.


Plus récemment, vous semblez développer une recherche autour de l'accumulation, de la couche, de la superposition... L'idée du volume est-elle contigüe à celle du pli ? 


Non. L'idée du volume (et du BLOC) est venue un peu après. C'est une sorte de réponse.



La typographie a une place très importante dans votre travail, comment alliez-vous un espace très épuré à des caractères impactant ? 

Je fais beaucoup de tests. J'imprime, systématiquement.


L'idée de gratuité est très présente dans votre travail, d'où vient cette envie ? 


Sur cette question je vous renvoie à l'article "Faire un livre c'est facile" publié dans La nouvelle revue d'esthétique ou ici.
Sinon pour préciser un peu ce qu'il y a dans l'article, je pense que ce qui m'a fasciné dans la réédition de Potlatch c'est l'extrême simplicité du procédé : abonner gratuitement 50 personnes, sans leur demander leur avis. À cette simplicité s'ajoutait tout de suite des considérations politiques qui correspondaient tout-à-fait à mes convictions.
Il se trouve que ces questions (très claires pour moi dès 1993) ont trouvé un échos particulier avec le développement d'internet, le copyleft, etc.



Le livre vit actuellement une certaine redéfinition. Comment vous situez-vous par rapport à ce changement ? "Bloc" peut-il être considéré comme un des livres pionniers d'une nouvelle génération naissante (remise en question de l'objet-livre, changement de dimension et de rôle du livre, diffusion gratuite sur internet...) ? 

Je ne sais pas si BLOC ou Un livre (Un pli.) sont les livres pionniers d'une nouvelle génération. Ce n'est pas à moi de le dire. Par contre je suis toujours ravi de voir l'idée du pli ou du bloc reprises par d'autres. C'est aussi pour ça que j'ai rédigé le petit mode d'emploi Faire un livre c'est facile. Pour donner envie. Les idées sont libres par définition. Elles n'appartiennent à personne. Seules les formes sont propriétaires.


Propos recueillis par moi même en Juillet 2010